L'auto (est le) mobile
"Telaga Angker" est le parfait exemple de la belle vitalité du cinéma d'horreur indonésien durant les années 1980s. Surfant sur la vague du succès du "Sundelbolong" ("Ghost with hole") original, le réalisateur Sisworo Putra et l'actrice culte Suzzanna rempilent pour cette "variation" parfaitement réussie. Tout reste évidemment relatif, film et effets sont totalement fauchés, mais le rythme soutenu et les meurtres suffisamment graphiques pour parfaitement remplir le quotient divertissement.
La réussite est assurée dès le générique d'ouverture avec un travelling latéral sur un cimetière de nuit et une grosse chauve-souris en plastique qui fait sa paresseuse apparition en étant peu ou prou agitée avec quelques grosses ficelles. Apparition terrifiante de Suzzanna, qui va se transformer en Penanggalan (ou "Krasue", une tête volante avec longues viscères pendouillantes) pour s'envoler dans un méchant ricanement. Apparition du titre du film avant d'embrayer sur le pourquoi du comment.
L'intrigue est relativement simpliste avec une sempiternelle histoire de vengeance de l'au-delà, après qu'une femme enceinte ait été injustement assassinée et sa dépouille jamais récupérée – et pour cause: lors d'une folle course-poursuite mollement mise en scène, Suzzanna se noie dans un profond lac, prisonnière de sa voiture, magnifique maquette lors d'un surprenant plan sous l'eau.
Les futures apparitions de Suzzanna ne seront pas en reste, prenant l'apparence d'un "Sundelbolong", un "fantôme avec un gros trou au ventre", symbole de l'enfant mort, que la femme portait en son ventre au moment de sa mort. Et à Putra d'enchainer des petits travellings circulaires sympatoches en débutant son plan par el fameux "trou", bien crade, rempli de petits vers blancs, preuve du joli état de décomposition du fantôme.
Les meurtres sont relativement nombreux et bien graphiques comme il faut, mais Putra n'en oublie pas pour autant le public féminin et plus jeune avec des scènes mélodramatiques assez réussies avec le retour d'Anita au sein de sa famille éplorée et quelques séquences comiques surprenantes, dont celle où Suzzanna avale un sac entier (!!) d'une espèce de spécialité indonésienne au goût de carton-pâte…le tout réalisé avec le fameux effet spécial Meliès de la "caméra arrêtée" avant de reprendre le même plan le plat en moins.
Preuve de l'autodérision, mais aussi de la forte popularité de l'actrice Suzzanna à l'époque, les nombreuses références au nom d'artiste, que ce soit par des affiches en arrière-plan des précédentes productions de Suzzanna ou à l'un des protagonistes d'entonner le tube "Susanna" lors d'une scène assez mythique.
Bref, un très bon divertissement, qui a justement terminé 4e meilleur succès du box-office 1986 avec 235.491 spectateurs sur la seule ville de Jakarta à l'époque.
