Les mauvais garçons
Revolver n'a rien de spécial. Un film presque banal, sur une histoire à peine originale, adaptée elle-même d'un manga qui a déjà donné l'un des plus beau film du monde "Aoi Haru", dont on n'oubliera jamais la musique de Thee Michelle Gun Elephant.
Revolver c'est simple, ça tient en quelques mots, et pourtant c'est un film auquel on s'attache, que l'on regarde à deux fois. C'est quelque chose que l'on oublie pas. Ce qui lui donne cette qualité c'est sa simplicité, son économie de moyen (tournage DV) ne cherchant jamais à épater qui que ce soit. C'est son regard sur un moment, une période de la vie qui transit avec ses doutes, ses questions et ses expériences. C'est aussi surtout encore du cinéma. Un cinéma qui se plaît à nous faire errer avec ses personnages paumés quelque part dans les ruelles de Shinjuku, pour le plaisir de nous raconter sa petite histoire, pour le bonheur de palper un peu de réalité dans le pays devenue capitale de l'hyper modernité. C'est une nuit où l'on se perd, où l'on rencontre et se retrouve pour mieux voir et croire à l'autre. Paumés, largués, les personnages, ces mauvais garçons, font l'expérience d'un réel mal être, d'une question de société qui ne cherche jamais à faire sa thèse.
Ici, jamais les principes ne prennent les devant de la mise en scène de Watanabe (cet inconnu à suivre). Son regard acompagne, s'amuse, rit, se révolte, ou s'interroge au diapason de ces trois lascards. Plaisir de filmer, plaisir d'un plan, d'une image volée quelque part dans Shinjuku, ou encore joie d'écrire l'image à hauteur de ces personnages qui prennent la pose dans un naturel typiquement japonais. Plaisir d'un tournage en DV qui donne au film un air naturel et intime, comme si la vidéo d'un ami s'était égaré là par hasard. Film sur trois potes, Revolver est un film ami. Ses leçons son universelles et sa morale est douce, tendre et amer. Revolver est un film qui osculte naîvement mais franchement, sincèrement. Il ne s'impose pas, il nous repose. Il ne cherche pas la révolte ni la résistance, il veut croire. Croire simplement à l'autre pour ce qu'il est, pas pour ce qu'il représente. Comme "Aoi Haru" de Toyoda, Revolver n'est pas un film qui prendrait comme seule racine des passions l'amité, mais bel et bien l'amour. Celui de trois amis, dont le film fait témoignage (trace) comme souvenir. Si l'amour n'existe bel et bien que dans le souvenir, comme un lien fait à la fois autant de présence que d'absence, alors Revolver est cet objet. Et cette arme symbolique qui hante et motive le film, est bien l'incarnation d'un désir, qui est avant tout celui d'être ensemble, et s'aimer.