jeffy | 3.25 | Belle histoire pour enfants. |
Astec | 3.25 | Souverain légitime |
Ghost Dog | 2.25 | Convenu |
La sortie de Léo roi de la jungle dans les salles françaises a de quoi contenter nombre d’amateurs d’animation ; parce que toute œuvre venant de l’univers de Osamu Tezuka – « le dieu du manga » - mérite en elle-même qu’on s’y attarde, parce que tous gardent en travers de la gorge également un certain Roi lion qui avait fait couler un peu d’encre en son temps...
Dernière adaptation en date d’un des manga les plus connus de Tezuka, Léo roi de la jungle, œuvre conçue avant tout pour les enfants, est bien loin de l’angélisme de certaines productions animées pour les plus jeunes préférant occulter les contradictions et vicissitudes de la vie au lieu de s’y confronter. A l’origine Le roi Léo est un manga publié pour la première fois au début des années 50 dans un grand magazine de prépublication destiné aux enfants. Pendant quatre années le manga de Tezuka saura captiver ses lecteurs tout en prolongeant des évolutions narratives initiées quelques années plus tôt et lourdes de conséquences pour l’avenir du manga. Suite au succès rencontré une déclinaison animée pour la télévision est entamée au milieu des années 60, suivie dans la foulée de la production d’un film d’animation et d’une seconde saison pour la série TV... Cette oeuvre de Tezuka, comme bon nombre de ses autres créations, est alors devenue un classique incontournable. La raison principale en est l’introduction de thématiques réalistes et un traitement ambitieux, avec une histoire mettant l’accent sur la continuité à une époque ou les manga se déclinaient essentiellement sous forme de petites histoires humoristiques. Si les premières adaptations animées pour la télévision bénéficièrent de l’implication de Tezuka lui-même qui venait d’ailleurs d’inaugurer, au début des 60’s, le format de la série TV (épisode hebdomadaire de 20 minutes) avec Astro, elles subirent néanmoins une édulcoration de son propos visant à en alléger la charge dramatique. Quelques trente ans plus tard et une nouvelle série TV (Jungle Emperor en 1989), est mis en chantier le long métrage Léo, roi de la jungle. Le motif premier en est la volonté affichée de Tezuka Production de répondre au Roi lion de Disney tout en faisant redécouvrir aux jeunes japonais une des œuvres essentielles de leur héritage "institutionnel" (oué, Tezuka c'est institutionnel) culturel contemporain.
A la lecture du « pitch » de Léo, roi de la jungle on est en droit se demander, hormis une ressemblance phonétique, en quoi Le roi lion de Disney a pu être suspecté de plagiat tant les deux œuvres semblent loin l’une de l’autre du point de vu de leurs enjeux. Et pourtant les premières minutes du film ne laissent aucun doute, s’il y en avait encore, sur l’existence de ces ressemblances : Léo vient d’apprendre qu’il est père et avec une énergie folle il se précipite sur un promontoire rocheux afin d’annoncer la nouvelle alentour, et tous les animaux de la jungle de se réunir pour célébrer la naissance des héritiers. Cette séquence rappelle bien entendu furieusement l’ouverture du film de Disney et le fait que Léo, roi de la jungle ait été produit après et en réponse à ce dernier n’est pas étranger à cette réminiscence. Mais tout en soulignant les « troublantes » similitudes entre les deux œuvres, cette ouverture synthétise également le gouffre qui sépare deux façons différentes d’aborder l’animation : full animation et 3D inflationniste pour l’école américaine, animation limitée et sens du découpage pour l’école japonaise. Plus modeste dans ses moyens, cette séquence d’ouverture dans le film japonais est pourtant d’une toute autre efficacité dans ses effets avec son montage ultra dynamique et immersif. Le reste ne fait que confirmer cette impression même si la réalisation se fait moins spectaculaire et très vite la richesse thématique de Tezuka (présent en tant que « figurant » dans une des premières séquences urbaines) emmène Léo sur des routes bien plus ambitieuses : le rapport de l’homme à la nature, de la science au pouvoir, l’expérience de la mort, le passage des générations... Le jour et la nuit. Sans être gratuit, toujours dans le cadre d’un propos plus général, la violence du monde moderne n’est donc pas absente du film et le nombre de décès au cours de l’histoire est là pour l’attester. Bien sûr, le temps ayant fait son office (le film est récent mais suit fidèlement l’esprit de l’œuvre originale) cette plus value thématique n’est plus vraiment aussi inédite qu’avant et garde quelques miasmes de son époque (voir les remarques de Ghost Dog), mais mis en perspective avec ce qui se produit encore en animation de nos jours de l’autre côté de l’Atlantique, il y a là une profondeur évidente qui trouvera toute sa dimension dans un final aussi beau que poignant.
Sans être un chef-d’œuvre au même titre qu’un Miyazaki des familles, cette adaptation de Léo, roi de la jungle réalisée par le vieux baroudeur Yoshio Takeuchi (série TV de Cobra, Cat’s Eye...) laissera indubitablement une trace au moins aussi profonde que son équivalent « disneyien », la légitimité historique en plus.
Surfant sur la popularité du Roi Lion (1994), Leo roi de la jungle (1997) offre une variation « Tezukienne » du monde de la jungle pour enfants. Le film s’ouvre sur une magnifique course de Leo à travers son territoire suite à la naissance de ses 2 petits : amples mouvements de caméra, fluidité, la scène permet d’espérer grand. La suite s’avère plus convenue et banale, confrontant une chasse au trésor sauvage à la vie animale bouleversée de la jungle ; le chara design typique de Tezuka, l’aventure et les bons sentiments écolo raviront peut-être les plus jeunes, mais les adultes curieux ou accompagnant ont de grands risques de s’ennuyer ferme tout en constatant que certains clichés ont la vie dure (l’Italien est avide et roublard, le chef a toujours raison,…).