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Le Tigre de jade

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les avis de Cinemasie

5 critiques: 3.7/5

vos avis

20 critiques: 4.01/5



jeffy 4.25 L'oeuvre d'un maître
drélium 3.75 Jusqu'au bout de la vengeance et des faux semblants
Anel 3.5
Ordell Robbie 3.5 Stylistiquement somptueux mais trop embrouillé scénaristiquement
Xavier Chanoine 3.5 Superbement cadré et un goût prononcé pour le rebondissement improbable
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L'oeuvre d'un maître

Plus que sur l'action ou sur l'image, le travail de Choh YUEN se base avant tout sur la construction dramtique. Avec Jade Tiger, sa logique cinématographique saute véritablement aux yeux. Construction du scénario d'abord, avec comme maître mot trahison, une trahison qui se répercute sur plusieurs niveaux, personne ne sachant sur qui compter, qui finit par emporter aussi bien les vainqueurs que les vaincus. Si les faux-semblants, les chausse-trappes jalonnent l'écriture du film, le talent de Choh Yuen réside dans sa mise en scène quasi théatrale. Chaque scène est parfaitement découpée, avec une introduction, un développement et un final. C'est particulièrement frappant sur les scènes courtes comme celle du lac de Yanbo. Chaque scène ainsi construite vient former au fur et à mesure le corps du récit, les parties purement descriptives restant très rares. Alors bien sûr, il y a les combats, mais ceux-ci n'ont par eux-mêmes aucune force symbolique comme c'est le cas chez CHANG Cheh, pas plus qu'ils ne portent de charge émotionnelle. Non, chez Choh Yuen ils ne sont que le nécessaire aboutissement, la conséquence des actes qui ont été semés, le fatum grec ou le karma bouddhiste. Il faut également reconnaître que Ti Lung était l'acteur idéal pour incarner le héros selon Choh Yuen, sa retenue naturelle servant de chambre d'écho aux interrogations du personnage. Alors plus que tout autre, Jade Tiger est pour moi LE film de Choh Yuen, celui qui nous livre le plus parfaitement la conception cinématographique du réalisateur, un film qui en appelle plus à l'intellect qu'au ressenti, un chef d'oeuvre qui dépasse Le Sabre Infernal ou La Guerre des clans.

28 décembre 2004
par jeffy




Jusqu'au bout de la vengeance et des faux semblants

Le Tigre de Jade peut être taxé de reprendre encore et toujours les mêmes ficelles chères à Chu Yuan lorsqu’il adapte le romancier taiwanais Gu Long, les mêmes ficelles qui ont fait les autres grands succès tels Killer clans ou Magic blade. Il est encore question de retournements de situations et de faux semblants à répétition, véritable sac de nœuds d’alliances secrètes qui dévoile pas à pas l’éternelle intrigue politique aux maintes ramifications où deux clans puissants recherchent le pouvoir sans hésiter à verser le sang et user de vengeance expéditif.

Acteur incontournable et préféré de Chu Yuan pour incarner le héros peu au fait de toutes ces manigances, Ti Lung et son physique avantageux est à nouveau le parfait personnage auquel le public s’identifie avec la même méconnaissance des soubresauts du pouvoir. Tout comme le public, il se répète souvent : "vous le saviez déjà ?", et son interlocuteur démasqué de répondre : "je le savais depuis le début !".

Le Tigre de jade s’enterre un peu dans cette logique redondante de l’ennemi qui devient ami aussi vite que l’ami devient ennemi et peine par moment à motiver autant qu’il le voudrait. Il se joue du spectateur mieux qu’il ne le passionne comme le dit si bien Iron. L’action martiale semble encore plus secondaire que dans ses autres films en particulier parce que le puissant clan rival Tang est spécialisé dans les armes empoisonnées type fléchettes, ce qui ajoute à l'ambiance dangeureuse et morbide mais abrège souvent fatalement les combats. Le scénario labyrinthique y est plus important que l’originalité des affrontements et le côté ludique d’un Magic Blade, et ce même si Tang Chia est une nouvelle fois aux chorégraphies.

Malgré ce petit manque de passion, le Tigre de Jade parvient à trouver une profondeur inédite et très particulière dans sa dernière partie. Le roman de Gu Long n’avait pas de fin propre et Chu Yuan s’attellera aux dénouements finaux avec passion. Il en résulte une belle réflexion sur la notion même de vengeance, l’absurdité de la haine, ce que l’occidental appellerait "œil pour oeil, dent pour dent" et finalement une belle conclusion sur le monde impitoyable et insensé des arts martiaux. Un pied de nez peut-être à ses propres origines familiales assez rigides.

Visuellement, Chu Yuan montre à nouveau l’étendue de son talent, sa maîtrise du cadre, sa capacité à utiliser des décors en studios, la brume, la fausse végétation et une nuit omniprésente, opaque et artificielle, pour transmettre une impression toujours envoûtante de monde lointain et fantastique où s’affrontent de braves et valeureux chevaliers qui tiennent du surhomme. La musique quant à elle est très minimale, à base de petits soubresauts de saxophone alto qui renforce habilement l'impression de mystère.

Le cast composé de tous les plus grands interprètes demeure parfaitement dans le moule habituel et chacun y tient le rôle qu’il transcende le mieux à l’écran. Ti Lung héros en quête de vengeance de son père décapité par le clan adverse, Lo Lieh parfait en maître fourbe moqueur et sans coeur, le seul à tenir une place claire et nette, Ku Feng en personnage des plus mystérieux, Yueh Hua grand chevalier poête, antagoniste de Ti lung, l'hétéroclyte Derek Yee dans un de ses premiers rôles, jeune arrogant limite schyzophrène qui marche sur les traces de son maître Lo Lieh, Lily Li, épéiste droite et franche. Tous offrent une belle prestance et vivent le beau et subtil texte de Gu Long, en particulier Yueh Hua et ses magnifiques vers.

Le Tigre de Jade ne possède pas tout pour captiver, s’attarde un peu trop sur ses petits messages secrets qui dévoilent tour à tour la vraie vérité qui s’avère fausse la minute d’après, mais reste assez profond, enchevêtré et visuellement superbe pour convaincre.



07 décembre 2004
par drélium




Superbement cadré et un goût prononcé pour le rebondissement improbable

Le Tigre de Jade est une oeuvre signée Chu Yuan une nouvelle fois extrêmement efficace et qui ne tient que par ses audaces scénaristiques qui privilégient les faux semblants avec une énergie redoutable tout en restant finalement cohérent, bien qu'improbable. Chu Yuan adapte Gu Long une nouvelle fois, s'arme d'un matériau solide pour laisser les fantaisies affluer à l'écran toutes les dix minutes : l'utilisation des armes donne ainsi lieu à des affrontements fantastiques au sens propre comme figuré, avec des étoiles empoisonnées, des bâtons cachant des lames et surtout des personnages colorés improbables que l'on dirait sortis d'une autre sphère comme ce clan Sans-Haine hors de l'humanité dirigé par des hommes qui n'ont pas de nom, tous invulnérables, dégoûtés par les rivalités pour le pouvoir et l'argent. Voici donc un beau message de la part de Chu Yuan envers les clans qui ne vivent que pour s'enrichir et qui n'hésitent pas à se tirer dans le dos pour être puissants. Le Tigre de Jade répond donc au cahier de charge d'une oeuvre estampillée Chu Yuan, à savoir cette redondance à montrer qu'il ne faut faire confiance à personne et que l'ami d'aujourd'hui peut devenir l'ennemi de demain. C'est ce qui fait aussi sa force, car avec une telle théorie, chaque apparition d'un nouveau personnage met systématiquement l'accent sur le danger ou le danger potentiel. Le film est aussi parsemé de séquences d'action relativement nombreuses, chorégraphiées par Tang Chia et filmées avec un sens rigoureux du cadre : chaque travelling n'est pas là par hasard, le découpage cut n'est pas non plus signe de gratuité, il donne toute la vigueur recherchée aux affrontements pas si impressionnants que cela.

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Le découpage fait tout le travail et dynamise le film de bien belle manière tout en laissant l'action lisible malgré les décors fourmillant de détails pouvant empêcher une certaine lisibilité notamment avec une abondance de couleurs. Il est aussi particulièrement lisible car le cinéaste attache une importance à certaines symboliques : chaque clan à sa propre couleur, il ne sera donc pas rare de voir capes rouges, blanches et noires se mettrent gentiment sur la figure dans un pur soucis de lisibilité. L'utilisation du rouge est ici aussi une nouvelle fois appuyée, moins pour les décors (une ou deux scènes montrent le classique soleil rouge crépusculaire inhérent au cinéma de Chu Yuan) mais plus pour le caractère "fantastique" de certains personnages : la petite fille vêtue de rouge secourant Zhao Wu-Ji n'est pas vêtue d'une telle manière par hasard, rien n'est fortuit chez le cinéaste. Hélas, le film est parfois alourdi par la sur-dramatisation des actrices et le trop plein de rebondissements incontrôlés, mais il faut bien un peu de larmes et un casting monstrueux pour rendre le film encore plus populaire qu'il n'est à l'origine. Le Tigre de Jade n'est pas un monument du wu xia pian, mais il remplit brillamment son contrat en offrant au spectateur un spectacle de tous les instants, guère avare en surprises et en idées improbables, comme cette fameuse potion du mort-vivant redonnant la vie à un Ti Lung juste incapable de mourir.



05 février 2008
par Xavier Chanoine


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