Abandon dans l'abondance
Dernier volet de la "trilogie de la solitude urbaine", après "Mozart Town" et "Animal Town".
Après le (peut-être) plus poignant "Animal Town", principalement du au thème extrêmement dur, Jeon Kyu-hwan renoue avec des "reclus" de la société coréenne avec le portrait de cette nord-coréenne, accueilli en Corée du Sud, mais incapable de s'adapter à la société démocratique. Il faut dire, qu'elle est doublement déboussolée, d'une part par le brusque changement de régime / patrie, puis par l'absence de son époux, resté de l'autre côté.
Jeon a franchement progressé dans sa manière de réaliser, abandonnant les quelques tics – dont l'usage abusif des filtres sur "Animal Town" – pour revenir à une forme plus épurée, quasi documentaire dans le suivi de la femme. Du coup, son film gagne en charge émotionnelle par une identification plus facile avec la fragile héroïne. Tel un cafard mis sous verre, Jeon l'observe se débattre et n'hésite pas de lui mettre des sacrés bâtons dans les roues pour la précipiter dans son malheur –sans que cela soit de trop…La femme va ainsi tenter de se dépêtrer, tentant de renouer avec un semblant de vie sociale, mais ce n'est que pour mieux s'enfoncer dans sa propre solitude et sentiment d'abandon.
C'est simple, c'est beau et constitue un parfait complément au film de Kim Dong-hyeon de 2007 (surtout sa première partie), "Hello stranger".
Quant à Jeon, il trace son chemin, après sa reconnaissance du circuit festivalier en ayant été sélectionné au prodigieux festival de Berlin et ayant déjà mis en boîte son 4e film, une comédie dramatique érotique et écrit les scénarii de son 5e et 6e…