Ghost Dog | 3.75 | Secrets et mensonges |
La structure narrative du Club de la chance a de quoi étonner, mais c’est principalement elle qui en fait son intérêt : réunies à l’occasion d’une célébration de départ en voyage, 4 mères sino-américaines et leurs filles respectives font le bilan mental de comment elles en sont arrivées là. Le film est donc composé de 4 longs flash-back équitablement répartis retraçant le parcours périlleux de ses femmes, de la Chine jusqu’aux USA. Par ce biais relativement complexe, Wayne Wang aborde des thèmes aussi riches que délicats comme les relations mères-filles, l’expatriation et l’intégration à une société culturellement très différente, ou le poids du passé qui influe sur les comportements. Constamment sur la corde raide entre émotion, justesse de ton et retenue à travers des sujets très casse-gueule, il s’en sort avec les honneurs en dressant un très attachant portrait d’une communauté qui cultive les secrets et les non-dits.
Toutes les femmes de la 1ère génération prises en exemple ici ont en effet beaucoup souffert avant de débarquer aux USA. Il faut dire que le régime en place et les traditions vivaces y sont pour quelque chose : mariages forcés complètement ratés, infanticides, abandon d’enfants lors d’un exode pour fuir la guerre… Leurs filles, elles, n’ont pas connu toutes ces épreuves, ce sont des américaines, et elles ont une vision déformée de ce qu’a pu vivre leurs mères en Chine, au point parfois de leur en vouloir viscéralement. Mais Wayne Wang s’attache à démontrer qu’elles ne sont finalement pas si différentes : d’une jeune fille qui parlait haut et fort, l’une est devenue docile et sans âme en croyant plaire à son mari ; une autre ne sait plus quoi inventer pour que sa mère l’estime et l’applaudisse dans ses choix… Dialogues, situations et interprétation d’un très bon niveau, Le club de la chance, produit par Oliver Stone, mérite vraiment qu’on s’y attarde.