Le goût des autres
On ne pourra pas dire, qu'Eric Tsang n'aura pas fait tout son possible pour raviver un peu la flamme vacillante du cinéma HK en se rapprochant notamment très fort de la jeune scène taïwanaise. Après sa récente "trilogie de la jeunesse asiatique" comprenant notamment "Winds of september" de Tom Lin, il aura soutenu le sauvageon Chie Jen-hao, qui s'est davantage illustré dans la presse locale pour ses aventures tumultueuses avec diverses starlettes, que pour son premier court-métrage néanmoins remarqué "His-Men Street".
Chie fait partie de cette nouvelle génération de réalisateurs comme Derek Kwok, qui sait parfaitement mettre en images des histoires beaucoup moins trippantes; bref, ce sempiternel mal des jeunes à privilégier le fond sur la forme. "Butoon Man" est donc ma-gni-fique dans son exécution avec des clairs-obscurs parfaitement à propos avec les remises en question de ses jeunes protagonistes et des teintes rouges-noirâtres rappelant sans cesse les couleurs du sang (séché) que doit enlever le nettoyeur (Francis Ng, égal à lui-même) sur des lieux de crimes.
L'histoire est incroyablement mince jusque dans son dénouement ultra attendu. Comme si Chie sentait, que son propos manque terriblement de fond et qu'on lui allait faire à coup sûr le reproche de privilégier la forme sur le fond, il n'hésite pas à marquer des longs temps de pause, à s'attarder sur le visage fatigué de Francis, seul à un bar, en train de se frotter les tempes de sa lourde tête, frappée par un mal de crâne éternel; sauf que ces poses paraissent tellement clichées en elle-même, sans aucun autre fond, que cette intention louable tombe, là encore, terriblement à plat.
On appellera ce "Button Man" une sorte d'exercice de style, une bonne idée pour un court étiré sur la longueur (inutile) d'un long. A Chie d'éviter le piège facile de ses prochains projets, qui risqueront de sceller son destin à l'instar d'un Wong Ching-Po (autre djeunz' de l'époque soutenu par Andy Lau et…Eric Tsang, notamment sur son raté "Jiang Hu") ou d'une Susie Au ("Ming Ming")…Des exemples d'étoiles filantes prises dans les filets de la grande toile noir HK.
Film un peu lent, parfois limite d'auteur, il aurait plus eu d'impact s'il avait été un court métrage. L'ambiance est sympa mais c'est un peu long, et le scénario semble tourner en rond. Il y a toutefois des scènes sympas, notamment avec le trio Francis- son apprenti et la prostituée.